La communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) souffle ses quarante bougies le 28 mai prochain. Pour marquer cette date, les Etats membres ont prévu, chacun, une série d’actions au plan national. C’est le cas au Burkina où le lancement des activités commémoratives, présidé par le Président du Faso, est intervenu ce jeudi, 21 mai 2015, à Ouagadougou.

« Une vision, un destin commun », c’est le thème qui sous-tend les quatre décennies d’existence (28 mai 1975) de la CEDEAO et qui compte à ce jour quinze Etats membres.
Une halte qui offre l’opportunité aux acteurs de faire le bilan des décennies d’expériences avant de se pencher sur les orientations nouvelles de l’organisation pour répondre à sa vocation.
A sa naissance, la CEDEAO s’est assignée pour principal objectif de promouvoir la coopération et l’intégration entre les Etats membres vue de la création d’une Union économique et monétaire pour favoriser la croissance économique et le développement de l’Afrique de l’Ouest, a rappelé son représentant-résident au Burkina, Mohamed Diakité.
A ce jour, et selon les acteurs, l’organisation a de ‘’nombreux’’ acquis à son actif au rang desquels, son expérience dans la résolution des crises et son engagement dans des opérations de maintien de la paix dans l’espace communautaire, la suppression des visas entre les quinze Etats membres, l’instauration du droit de résidence et d’établissement, la mise en œuvre du passeport biométrique CEDEAO, l’effectivité du tarif extérieur commun (TEC). A cette liste, s’ajoute certains grands chantiers intégrateurs relatifs aux infrastructures et à l’économique tels que l’autoroute côtière Lagos-Accra-Abidjan-Dakar, l’autoroute de désenclavement de l’hinterland sahélo-saharien, la boucle ferroviaire Abidjan-Ouaga-Niamey-Cotonou, le gazoduc ouest-africain et le pool ouest-africain de distribution d’électricité.
Cependant, l’organisation reste confrontée à de nombreux défis au regard de ce qui a motivé sa création. Il faut œuvrer à ce que le processus d’intégration ait un impact plus significatif sur le développement des Etats afin d’améliorer substantiellement les conditions de vie des populations de base de l’espace. « Pour cela, nous devons nous investir, sans réserve, pour renforcer la visibilité et la crédibilité du processus d’intégration », a jaugé le Président du Faso, Michel Kafando avant de dresser la liste des challenges. Il s’agit de l’accélération du processus d’harmonisation des politiques macro-économiques, du développement du capital humain et des infrastructures économiques, du renforcement d’une approche régionale plus intégrée en matière de réduction de la pauvreté, de la consolidation de la paix, la stabilité politique et de la démocratie. A cela, s’ajoutent la création de la monnaie unique en 2020 et l’effectivité des droits reconnus en matière de libre circulation des personnes et des biens.

La libre circulation des personnes et des biens, basic pour réussir l’intégration

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Le Président du Faso a, dans cette optique, salué le processus de relecture des textes en cours afin d’être plus en phase avec les mutations au plan international et créer un environnement politique, économique et social stable comme garanties du processus d’intégration économique et financière.
« La construction d’un espace sous-régional intégré connaît ces dernières années une évolution majeure qui requiert une plus forte implication des populations à la base. En effet, le nouveau paradigme énoncé dans la Vision 2020 de la CEDEAO qui prône le passage d’une CEDEAO des Etats à une CEDEAO des peuples invite les Etats membres à tout mettre en œuvre pour que les premiers bénéficiaires des acquis de l’intégration régionale que sont les populations soient au cœur du processus de modélisation et d’harmonisation de l’espace ouest-africain », a expliqué Michel Kafando.
Selon le Président du Faso, pour atteindre cet objectif, l’un des défis majeurs à relever est incontestablement le changement des mentalités et des comportements de toutes les couches sociales de l’espace communautaire. D’où la nécessité d’une synergie d’action de l’ensemble des acteurs (étatiques et non étatiques) pour intensifier la sensibilisation aux fins d’une meilleure appropriation des politiques et chantiers de l’intégration par les communautés et les groupes cibles.
De son avis, la libre circulation des personnes et des biens est l’un des piliers de tout processus d’intégration et son effectivité implique la prise de décisions consensuelles des Etats qui prennent en compte les particularités de chacun « avec comme boussole, le bien commun et l’application effective des textes qui en résultent ».
Une volonté affirmée, dit-il, par les Chefs d’Etat et de gouvernement lors de la 43ème session de la CEDEAO tenue à Abuja (Nigeria) en juillet 2013 au cours de laquelle ils ont exprimé leur détermination à rendre effectifs les protocoles de la CEDEAO sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et d’établissement. A cet effet, le Burkina a été mandaté par l’organisation pour suivre la mise en œuvre effective de ces instruments. Une des actions fortes dans ce sens est l’organisation en juillet 2014 à Ouagadougou, d’un « Forum régional citoyen » sur la libre circulation des personnes et des marchandises qui a abouti à des recommandations dont certaines ont été approuvées par les Chefs d’Etat et de gouvernement notamment, l’institution de la carte d’identité biométrique et la suppression de la carte de séjour dans l’espace communautaire ouest-africain.
Pour le Président du Faso, cet arrêt offre l’occasion de réitérer l’attachement « ferme » des Etats membres aux objectifs de l’organisation et leur engagement pour qu’elle soit en adéquation avec les ambitions et les réalités du contexte international. Soulignant que son pays, le Burkina, reste engagé à poursuivre avec l’ensemble des autres Etats membres, les efforts pour promouvoir les progrès économiques et politiques pour une CEDEAO de paix et de stabilité.

Que faut-il comprendre de la « Vision 2020 » ?

C’est en 2007 que la « Vision 2020 » a été adoptée. Elle découle du constat que l’objectif de départ de l’organisation, qui est d’améliorer le niveau de vie des populations, peinait à se dessiner au bout de trois décennies d’existence. Pire, la pauvreté et les inégalités se sont accrues, et la réalité montre des Etats membres confrontés aux questions de lutte contre la pauvreté. Il faut donc changer de façon de fonctionner en quittant les conceptions bureaucratiques et monopolistes pour une organisation aux mains de ses ‘’véritables’’ destinataires à savoir, les populations à la base. « Vision 2020 » vise à « créer une région sans frontière, paisible, prospère et cohérente, bâtie sur la bonne gouvernance et où les populations ont la capacité d’accéder et d’exploiter ses énormes ressources par la création d’opportunités de développement durable et de préservation de l’environnement ».
Ce plan de passage de la CEDEAO des Etats à celle des peuples repose sur cinq piliers : « la mise en valeur des ressources de la sous-région », « la paix et la sécurité », « la gouvernance », « l’intégration économique et monétaire » et « la croissance du secteur privé ».
Ce qui requiert « l’opérationnalisation du partenariat préconisé par la Vision », « un changement profond des mentalités et des comportements » et « la construction d’une communauté de droit et de paix ».
Au Burkina, la célébration du 40ème anniversaire sera marquée (et ce, jusqu’au 7 juin) par plusieurs activités parmi lesquelles, une exposition des produits de la CEDEAO à la Maison du peuple, des tournois de maracana et de volley-ball, une nuit culturelle et une course cycliste professionnelle.

Oumar L. OUEDRAOGO
Lefaso.net