La ministre de la Femme, de la Solidarité nationale et de la Famille, Laure ZONGO/HIEN

La communauté internationale commémore  le lundi 06 février 2017, la «Journée tolérance zéro» à l’égard des mutilations génitales féminines (MGF). Au Burkina Faso, cette journée placée sous l’égide du ministère de la Femme, de la solidarité nationale et de la famille, cette journée est célébrée sous le thème : «La mise en œuvre du Plan stratégique national (PSN) de promotion de l’élimination des mutilations génitales féminines2016-2020 : défis et perspectives. » Un thème qui vient une fois de plus rappeler la nécessité de conjuguer les efforts au triple plans sous régional  régional et international pour l’éradication de ces pratiques dégradantes au nombre desquelles l’excision, pratiquée sur les fillettes, les jeunes filles et aussi chez certaines femmes.

Au Burkina Faso, l’excision est bien connue et seuls quelques groupes ethniques minoritaires ne la pratiquent pas. Les raisons évoquées par les communautés pour justifier cette pratique sont entre autres, l’incontinence sexuelle des femmes, le passage à la vie adulte, la purification de la fille, la préservation de l’identité féminine et culturelle.

Etat des lieux de la pratique de l’excision

Partout dans nos sociétés, l’excision est un sujet tabou, que personne n’ose ouvertement aborder. Pourtant les femmes et les filles de pratiquement toutes les tranches d’âge sont concernées. A titre d’illustration, l’Enquête démographique de la santé (EDS) IV de 2010, révèle des chiffres qui en disent long sur la pratique des MGF. Selon cette enquête, 76 % des femmes de 15 à 49 ans sont touchées par les MGF, de même que  13% des filles de 0 à 14 ans,  25% des filles de 10 à 14 ans, 14,2% des filles de 5 à 9 ans, et 4,7% des filles de moins de 5 ans.

Toutefois, on observe une baisse sensible du taux de prévalence national de la pratique de l’excision. Ce taux est passé de 75,8 % en 2010 à 67,6% selon l’Enquête multisectorielle continue (EMC) menée en 2015, chez les femmes de 15 à 49 ans. Cette baisse est également observée chez les jeunes filles de la tranche de 0 à 14, où ce taux est passé de 13,3 % 2010 à 11,3 % 2015.

Il convient cependant de relever que le taux de prévalence varie d’un groupe ethnique à un autre et d’une région à une autre.Les proportions de femmes excisées les plus élevées sont relevées dans les régions du centre-Est (90%), du Nord (88%), du plateau-Central (88%) et  du centre-Nord (87%).

Les données de cette évaluation ont montré que, malgré une baisse sensible de la pratique de l’excision, des poches de résistance subsistent dans plusieurs régions du pays. Et le vandalisme orchestré sur la gendarmerie de Bagré le 26 janvier 2016 par des manifestants pour libérer des personnes gardées à vue et soupçonnées d’être impliquées dans l’excision de jeunes filles dans ladite commune,vient rappeler que le bout du tunnel n’est pas si proche qu’on le pense.

Les actions entreprises en vue de lutter contre les MGF

Pour faire face à l’ampleur et aux conséquences des MGF dont les infections, l’hémorragie, la formation des chéloïdes, l’infection à VIH, l’hépatite B et autres maladies hématogènes, la stérilité, l’incontinence urinaire, les complications lors du travail et de l’accouchement et même la mort, l’Etat et quelques partenaires ont entrepris des actions. Il s’agit entre autres de la création d’une structure Nationale de lutte contre la pratique de l’excision, le SP/CNLPE, de l’adoption de la loi N°043/96/ADP du 13 novembre 1996 réprimant les mutilations génitales féminines, de la mise en place d’un numéro vert, le 80 00 11 12 auquel les populations peuvent appeler pour faire des dénonciations anonymes de cas d’excision ou toute intention d’excision. A cela s’ajoute l’organisation de campagnes de vulgarisation et de sensibilisation sur la loi ci-dessus citée et la tenue de rencontres de concertation avec le Mali et la Côte d’Ivoire pour la coordination des activités transfrontalières contre l’excision.

L’impact certain des actions menées par l’Etat et ses partenaires

Les nombreuses actions menées par l’Etat burkinabè et ses partenaires ont finalement pu faire bouger les lignes dans la bataille contre les MGF et permis d’engranger des acquis.En effet, de plus en plus de femmes (74% par exemple de celles interrogées dans le cadre de l’EDS 2010) se disent favorables à l’abolition de l’excision. A cela il importe d’ajouter la baisse de la prévalence de l’excision de 15% en 2006 à 11% en 2015 dans la tranche d’âge de 0 à 14 ans. Il y a la volonté de faire de l’élimination des MGF une priorité nationale, notamment à travers  l’allocation de ressources par l’Etat pour la mise en œuvre des activités. Les résultats sont palpables : les dénonciations anonymes de cas d’excision (195 cas depuis 2008), la condamnation des auteurs et complices de l’excision (428 personnes dont 52 exciseuses condamnées à des peines d’emprisonnement et d’amende de 2008 au 31 octobre 2016), l’intégration des modules traitant des MGF et de la loi dans 164 écoles primaires et secondaires, et l’adoption en Conseil desministres du 05 janvier 2017 du Plan stratégique national 2016-2020 de la promotion de l’élimination de la pratique de l’excision.

Enracinée dans les coutumes et la religion, l’excision est un sujet complexe et le changement de comportement ne peut se faire du jour au lendemain. C’est pourquoi l’instauration de la Journée internationale tolérance zéro à l’égard des mutilations génitales féminines est salutaire. Cette journée, le Burkina Faso a joué un rôle de premier plan dans les démarches qui ont présidé son instauration.

En rappel, le 06 février a été institué « Journée tolérance zéro » à l’égard des MGF en 2003 par le Comité interafricain contre les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des enfants (CI-AF) lors de la Conférence internationale sur les mutilations génitales féminines à Addis-Abeba, et entériné Journée internationale par l’Assemblée générale des Nations-unies à travers la résolution A/RES/67/146 relative à l’«Intensification de l’action mondiale visant à éliminer les Mutilations Génitales Féminines» du 20 décembre 2012.

Ministère de la Femme, de la solidarité nationale et de la famille