Arts plastiques : Issouf Diero, le sculpteur bobolais qui continue d’étendre ses tentacules.

C’est dans le quartier Colma de la ville de Bobo-Dioulasso, qu’Issouf Diero a installé son quartier général. Dans la cour familiale, où trônent de géants manguiers sous lesquels cancanent des canards et glougloutent des dindons, Issouf Diero se dirige vers ce qu’il appelle affectueusement « le laboratoire ». Ici, des bidons sont transformés en masques ou en sculpture. Il n’y pas que des objets sculptés dans ce lieu qu’il dédie à sa création. Issouf est aussi peintre, d’où ces tableaux accrochés de part et d’autre et qui attirent l’attention du visiteur. L’artiste est un champion de la récupération. Il a surtout jeté son dévolu sur le pneu usé.

« Je créé à 90% avec des objets récupérés. J’ai hérité ce savoir de mon père qui fabriquait des sandales en pneu en Côte d’Ivoire. J’ai grandi dans cette atmosphère qui m’a aidée dans ma quête créative et dans la consolidation de mon identité culturelle. Je suis dafing et on reconnaît aux dafing leur capacité à transformer le pneu ou à le coller que ce soit en Côte d’Ivoire, au Ghana ou au Burkina. C’est pourquoi je m’en inspire énormément pour créer mes œuvres. Le pneu vient de la France quand on finit de l’utiliser. Il traverse ensuite la mer et débarque chez nous. A mon tour, je continue de raconter à ma manière l’’histoire de ce pneu voyageur » confie-t-il.
Depuis ce samedi 29 avril, la ville de Bobo-Dioulasso vit au rythme de la Semaine Nationale de la Culture et Issouf Diero n’organise pas d’exposition à cette occasion. Cette année, il se contente de décorer le stand d’une entreprise de fabrication de pneus et il va pendant la SNC partager sa passion pour la transformation du pneu au sein de ce stand-là.

En fin stratège, Issouf Diero sait s’adapter aux besoins de ses potentiels clients. En Afrique, il fabrique des œuvres qui lui permettent de survivre. « Je vends des pièces qui me permettent d’acheter du carburant et de payer mes factures. Ce qui m’aide à gagner ma vie en tant qu’artiste d’ici. Et quand je voyage, je vise les besoins des clients de l’extérieur. Les œuvres d’art qui marchent ici ne marchent pas forcément là-bas et vis-versa » précise Issouf Diero.
En ce moment, sa lampe luminaire fabriquée avec des fils de fer extraits des bordures de pneus, a le vent en poupe. En un mois, il a conçu 35 lampes, avec des commandes à l’extérieur. « Avec les bordures du pneu, je créé des formes qui vont devenir des lampes. En 4 semaines, j’en ai fabriqué au minimum 35 avec des commandes en France. J’ai actuellement mal au doigt à force de tordre le fer. Mais c’est mon travail et je ne me plains pas. » souligne-t-il en souriant.
Très actif sur les réseaux sociaux, Issouf Diero continue de polir son art pour un jour s’imposer dans sa ville et à l’international. Il va bientôt séjourner en France, en Allemagne et dans deux pays africains, toujours pour mieux faire connaitre ses créations.

✍️Marie Laurentine Bayala